Le tableau Faim de loup, fin renard est une œuvre narrative qui nous ramène à l’époque, pas si lointaine, où les Laurentides étaient sous la botte des magnats de l’industrie forestière qui avaient alors les coudées franches: «Les « barons du commerce du bois » sont, avec les « Lords du chemin de fer », les grands argentiers des partis politiques. Aussi, obtiennent-ils facilement non seulement d’immenses concessions forestières à des coûts dérisoires, mais encore une législation qui favorise leurs intérêts et tend à protéger et à consolider leur monopole*.» Durant la deuxième moitié du 19e siècle, la forêt est littéralement sous le joug d’une législation inique qui porte préjudice à la colonisation. Cet antagonisme entre les colons, «faiseurs de terres», et les barons «faiseurs de bois» a marqué l’histoire des Laurentides. Le député P.-B. Benoit, fondateur, en 1884, de la colonie de Saint-Gérard-de-Montarville (Kiamika), déclare à propos de l’attitude d’un baron du bois nommé Stewart: «Il ne tient pas à voir des colons indépendants dans ses limites, qui amèneraient avec eux des marchands qui feraient concurrence à ses magasins et qui feraient augmenter le prix de la main-d’œuvre. À part le canton Kiamika dont les terres sont en vente, je ne crois pas qu’un seul colon depuis la Grande Chûte, à 100 milles en amont, n’a de titre de propriété, quoiqu’il y ait des gens qui y résident depuis près de cinquante ans.
Faim de loup, fin renard illustre cette époque d’opposition entre colons et compagnies forestières. L’enjeu: conquérir le conquérant. Dominique Beauregard nous présente les protagonistes de cette lutte épique qui s’affrontent sur un damier. Une œuvre encore une fois chargée de symboles qu’elle nous invite à découvrir.